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Barbelé Concertina @ l’Opprimé (75)
vendredi 9 janvier 2015
Barbelé Concertina.
Dans ma prime jeunesse (je parle d’un autre siècle, celui des guerres mondiales), il était courant de manifester son enthousiasme par l’expression: « Ça déchire! ».
Si ce n’était pas suffisant pour exprimer la puissance de notre ressenti, nous disposions d’une forme superlative: « Ça déchire sa race! ».
Par coquetterie, je préférais généralement me faire comprendre avec un « Ça lacère ses géniteurs! » qui ne laissait planer aucune ambigüité sur la joie qui m'habitait.
Parce qu’il faut savoir parler la langue de son temps, peut-être serait-il temps de remettre mon superlatif au goût du jour?
En 2015, espérons que ça balafre ses ancêtres (et jusqu’en afrique s’il le faut)...
Je vous souhaite donc une année de discrimination positive (ne gardons que le meilleur) qui scarifie sa bio-diversité de la majorité invisible!
Il se trouve qu’une merveilleuse occasion de cure de jouvence est offerte à mon champs (lexical) de bataille, et qui me fait rajeunir rien qu’à l’idée d’avoir survécu à ce dernier réveillon pour ça.
Ce vendredi 9 janvier, j’aurai en effet l'immense plaisir (qui déchiquète ses aïeux) de faire un concert en duo avec Lucas Barbier, à 22h30 au théâtre de l’Opprimé.
Nous jouerons de la musique tailladée entre écriture au scalpel et improvisation au couteau, conçue pour 2 musiciens et 3 sampleurs (ou plus).
Autant dire que ça va tourner en rond et en spirale, un peu comme une scie circulaire mâtinée de machine à couper le jambon, peut-être même beaucoup et longtemps, et s’écorcher parfois dans les noeuds de viscères et autres torons...
Parce que nous nous devions de communiquer sur ce projet et de lui donner un nom, il nous a fallu souscrire à la clause de style qui consiste à parler pour ne rien dire pour remplir un programme.
Il nous est assez vite apparu que nous devions intituler ce projet « Barbelé », parce que nous y déroulons un fil musical auquel nous faisons subir de nombreuses torsades semées d'épissures…
Nous avons ensuite découvert qu’il existait un Barbelé dit « Concertina », serti de lame de rasoir, et couramment utilisé en spires improvisées sur les bords des tranchées dont on commémore le centenaire.
Oh, joie qui charcute sa généalogie! Notre texte de présentation était sous nos yeux, ici: http://fr.wikipedia.org/wiki/Fil_barbelé_concertina
C’est donc avec une allégresse sans borne (et qui dépèce son hérédité) que je vous convie à fêter avec nous le nouvel an le 9 janvier, d’abord à 20h30 avec « Tu Trembles » de Bruno Allain, mis en scène par Marie-Christine Mazzola, et/ou à 22h30 avec le concert de « Barbelé Concertina ».
Le concert seul est à 10€, la soirée entière (pièce + le concert) est à 20€. Autant dire que c’est une affaire en acier trempé 18 carats: vous ne trouverez jamais ni nulle part ailleurs de spectacle à ce point rasoir (qui tranche sa filiation) à ce prix-là!
Un tel bonheur n’arrivant jamais seul, j’attire votre attention sur la programmation (qui démantibule sa dynastie) de la Charmante Compagnie à l’Opprimé (78 rue du Charolais, 75012) du 7 au 25 janvier.
Pour en savoir plus, vous pouvez télécharger ici le programme détaillé ou vous rendre sur ce site: http://lacharmantecompagnie.blogspot.fr
Je vous souhaite tout de bon du meilleur coté du fil du rasoir, et vivement 2015 qu’on s’en paye une bonne tranche!
La figure du barbelé délimite un espace clos, tout autant qu’elle laisse entrevoir l’au-delà de ce qu’elle ferme; elle matérialise l’infranchissable tout en invitant le regard et l’ouïe à sa transgression. Elle est frontière à la fois ouverte et fermée.
Le barbelé concertina, très en vogue sur les bords des tranchées, est un fil de fer serti de lames de rasoir, dont les qualités anti-intrusives ne sont plus à démontrer.
Au cours de première guerre mondiale, « il y avait un véritable engouement pour le concertina. D’innombrables bobines de fils barbelés classiques ont été converties en concertinas en formant des spires et en liant chacune d’entre elles à la suivante.
Les nouvelles spires étaient retournées sur elles-mêmes à chaque fois. Cela a permis de constituer des rouleaux de fil barbelé concertina improvisés. » (*)
Aujourd’hui, le barbelé concertina se décline couramment dans une version électrifiée.
Barbelé Concertina, c’est de la musique aux accents de rouille, qui tourne en rond entre quatre miradors dans la géométrie des grands espaces.
Lucas Barbier: 6 cordes à vif qui lacèrent les aigus.
Gaël Ascal: 4 cordes plombées qui enterrent les graves.
Deux solitudes concertantes qui croisent le fer de leurs cordes pour explorer la condition du barbelé, en convoquant la plupart des propriétés des enchevêtrements aléatoires ou maîtrisés.
Un concert galvanisant inspiré par le sens de la spire, et qui donnera à qui veut l’entendre du barbelé à retordre.
(*) Source: (en) Bernard Adams, Nothing of Importance – A Record of Eight Months at the Front with a Welsh Battalion October 1915 to June 1916, Methuen & Co, 1917
Concert à 22h30 au théâtre de l’Opprimé, 78 rue du charolais, 75012, en seconde partie de «Tu trembles» de Bruno Allain, mis en scène par Marie-Christine Mazzola, dans le cadre de la carte blanche à la Charmante compagnie.